Le rendement des livrets d’épargne réglementés s’enfonce dans le rouge. L’assurance vie est à peine mieux lotie.
Analyse: Hervé rousseau
L’inflation galope de plus en plus vite. Aux Etats-Unis, les prix se sont envolés de 8,5 % au mois de mars. Du jamais-vu depuis 1981. L’Europe est également rattrapée. Selon Eurostat, l’inflation s’est accélérée à 7,5 % en mars. Un niveau sans précédent depuis la création de l’euro. Pour lutter contre les effets néfastes sur l’économie de la crise sanitaire, les banques centrales ont activé la planche à billets et inondé les marchés de liquidités. Plus récemment, la guerre en Ukraine a provoqué une flambée des prix de l’énergie et de nombreuses matières premières, alimentant encore un peu plus la valse des prix. Le conflit a aussi largement désorganisé les chaînes mon dialisées de production et d’appro visionnement. Résultat, l’inflation s’est littéralement envolée. Elle grignote le pouvoir d’achat des ménages et l’épargne. Les bas de laine sont en effet pleins à craquer.
Selon la Banque de France, pendant les confinements, les Français coincés chez eux ont gagné plus de 170 milliards d’euros d’épargne. Une bonne partie de ce trésor dort sur des comptes courants ou des livres d’épargne réglementés. Il est ainsi bien chichement rémunéré. Le taux du taux du livret A et du livret de développement durable et solidaire (LDDS) a doublé en décembre dernier. Mais à 1%, il reste bien maigre. Le rendement réel de ces produits sans risque et sans fiscalité, rogné par l’inflation, s’enfonce dans le rouge, et les 476,5 milliards placés sur ces livrets réglementés fondent comme neige au soleil. L’assurance-vie, l’autre produit d’épargne préféré des Français (1 876 milliards d’encours selon France Assureurs), est à peine mieux lotie. Le taux moyen des fonds en euros devrait tourner autour de 1,2 % cette année, soit un peu moins de 1 % après impôts.
Elles en profitent naturellement pour soigner leurs actionnaires. Selon les calculs d’Allianz GL, les dividendes versés par les sociétés européennes devraient ainsi atteindre 410 milliards d’euros cette année. « Le rendement de l’indice large européen, le Stox 600, ressort ainsi à 3,06 %» selon Alexandre Baradez, stratégiste chez IG France.
Les copieux dividendes des champions du CAC 40
En France, selon le consensus des analystes Fact Set, les sociétés du CAC 40 devraient distribuer près de 58 milliards, ce qui serait un record historique. Le précédent sommet remonte à 2019, juste avant la crise sanitaire. Les champions du CAC 40 avaient alors versé 49,2 milliards selon la Lettre Vernimmen. Cette manne provient des profits records engrangés par ces entreprises l’an dernier. Elles ont réalisé près de 140 milliards de bénéfices nets ajustés en 2021 selon Fact Set. Le précédent record datant de 2007 (94 milliards) est pulvérisé. Le rendement du CAC 40 ressort ainsi à environ 2,91%, constate Alexandre Baradez. Un solide argument pour les marchés d’actions. D’autant que certaines entreprises offrent bien plus.
Aux cours actuels, Crédit agricole SA affiche ainsi un rendement sur dividende de 10,5%, Stellantis rapporte 7,6%, BNP Paribas 7,5 % et Engie 7,4%.
Ces copieux dividendes s’ajoutent à une belle performance boursière en 2021 (+28,9% pour le CAC 40). La saison des assemblées générales, chargées notamment d’avaliser les politiques de dividendes, vient tout juste de débuter. Elles sont aussi l’occasion de sepen cher sur des sujets bien plus épineux, comme la rémunération des dirigeants. Chez Stellantis, les actionnaires se sont d’ailleurs prononcés contre la rémunération de l’ensemble des dirigeants, après la polémique sur le salaire du directeur général Carlos Tavares. Mais cet avis est purement consultatif. L’assemblée générale a en revanche validé, et à une très large majorité, le versement d’un dividende de 1,04 euro par action, soit 3,3 milliards au total. En grande forme, Stellantis a triplé son résultat net en 2021 (à 13,4 milliards) et augmenté son coupon dans les mêmes proportions.